RESTAURATION DES VITRAUX DE L’ÉGLISE SAINT.GEORGE DE DRUMMONDVILLE: un projet patrimonial d’envergure
RESTAURATION DES VITRAUX DE L’ÉGLISE SAINT.GEORGE DE DRUMMONDVILLE : un projet patrimonial d’envergure

Le mandat de la restauration complète des vitraux de l’église Saint-George à Drummondville, un lieu phare du patrimoine local, me fut confié en 2022 dans le cadre d’une vaste opération de restauration et de préservation initiée il y a plus de 30 ans par la Fondation de l’église St.George inc. Je suis fière d’avoir pris part à ce projet d’envergure.
Construite en 1855, puis reconstruite en 1863 après un incendie, cette église anglicane renferme des vitraux uniques et d’origine, dont deux œuvres commémoratives parmi les plus anciennes de la ville. Ils ont été commandé à John C. Spence , domicilié à Montréal vers 1858, premier verrier répertorié au Québec, manufacturier et importateur de vitraux pour les églises et les édifices publics. Malheureusement, plusieurs d’entre eux étaient gravement détériorés, menaçant même de s’effondrer. Mon travail consista donc à restaurer ces 30 vitraux, pièce par pièce, en respectant les techniques traditionnelles et l’authenticité de chaque œuvre.
Durant plusieurs mois, j’ai recueilli dans mon atelier ces fragments du passé, travaillant en étroite collaboration avec l’architecte Robert Pelletier de la firme UN À UN ARCHITECTE et l’entrepreneur général Construction B. Moreau. Ensemble, nous avons veillé à redonner tout leur éclat à ces fenêtres de lumière qui furent, tant bien que mal, protégées à la hâte dans les années 1980 par des treillis et des panneaux en plexiglass.
Aujourd’hui, les vitraux restaurés de l’église St.George à Drummondville ont retrouvé leur place dans le chœur et les murs de l’église, révélant à nouveau leurs couleurs, leurs symboles et leurs pouvoirs évocateurs. Cette restauration ne visait pas seulement à préserver un bâtiment, mais à transmettre un pan de notre histoire collective.
Ce projet, au-delà de la technique, incarnait pour moi un engagement profond envers la mémoire, la beauté et la transmission du savoir-faire verrier. Cette restauration m’a permis de me distinguer au Conseil des métiers d’art du Québec avec le prix MAESTRIA.
Un savoir-faire alliant tradition et précision
La restauration des vitraux de l’Église anglicane Saint.George, à Drummondville, a représenté l’un des mandats les plus exigeants de ma carrière.

Forte d’une formation en France auprès d’un maître verrier, j’ai appliqué dans ce chantier des méthodes ancestrales, tout en m’appuyant sur mes vingt années d’expérience. Chaque étape a exigé rigueur et sensibilité. J’ai restauré ces œuvres dans le respect des pratiques traditionnelles : baguettes de plomb façonnées à l’ancienne, verres soufflés à la bouche provenant de la verrerie Saint-Just, grisaille cuite au four, ajustée après de nombreux essais pour retrouver une teinte harmonieuse.
L’état de détérioration des vitraux exigeait une remise en plomb complète impérative. J’ai procédé à une cimentation selon les règles de l’art, assurant l’étanchéité et la solidité des panneaux. Chaque pièce fut nettoyée, réparée ou remplacée avec soin, dans un souci constant d’authenticité.
Avant toute intervention, un diagnostic minutieux fut réalisé. Un frottis précis permit de garantir la remise en place fidèle des pièces et le respect du motif original. Les fissures furent stabilisées avec une colle époxy transparente (HXTall), et les éléments faiblement endommagés furent consolidés sans remplacement, privilégiant une approche réversible et fidèle aux matériaux d’origine et selon les règles des maîtres restaurateurs. Lorsque le remplacement s’imposait, des verres antiques rigoureusement sélectionnés furent utilisés. Les motifs peints à la grisaille furent restaurés avec une extrême précision grâce à des gabarits en vinyle découpés numériquement, une approche qui garantissait un rendu fidèle sans altérer la composition d’origine.
La vitre maîtresse, composée de trois lancettes ogivales et de six médaillons, se révéla particulièrement problématique. Restaurée de façon inappropriée dans les années 1960, elle ne respectait aucune norme de conservation. L’entrepreneur a éprouvé de grandes difficultés à la désencadrer, en raison de petits clous dissimulés et d’un mastic prohibé qui causèrent de nombreux bris, surtout sur le pourtour.
À l’atelier, j’avais constaté la présence de pièces inversées, mal repeintes, sans aucune correspondance avec les éléments d’origine. L’absence de vergettes de soutien et l’usage d’un ciment à prise rapide complexifièrent le dessertissage. J’ai dû travailler avec une extrême précaution puisque certaines pièces de Verre Antique n’avaient que 1,5 mm d’épaisseur.
Après un trempage prolongé dans de l’eau déminéralisée, j’ai nettoyé les pièces avec prudence, en particulier les zones peintes à la grisaille, fragilisées par le temps. J’ai remplacé ensuite les pièces lacunaires une à une, en veillant à leur intégration harmonieuse au sein de la composition originale.
RENAISSANCE D’UN VITRAIL : étapes et savoir-faire d’un chantier patrimonial
À travers cette série de photos, je dévoile les étapes clés de la restauration d’un vitrail ancien – de la dépose à la peinture sur verre, jusqu’à la remise en place finale. Ce projet témoigne d’un engagement envers la transmission du savoir-faire traditionnel et la valorisation du patrimoine religieux québécois.
Avec le temps, la poussière, la suie et les particules en suspension s’accumulent à la base des vitraux, formant une couche opaque qui altère la luminosité et peut piéger l’humidité. Cette accumulation favorise la corrosion des baguettes de plomb, notamment dans les zones de contact avec le verre et les soudures.
Par ailleurs, le plomb, matériau naturellement malléable, s’affaiblit avec les années, subissant un processus d’effritement et de fissuration sous l’effet des variations thermiques et des contraintes mécaniques. Cet affaiblissement peut entraîner un affaissement du vitrail, augmentant les risques de bris de verre et compromettant la stabilité de l’ensemble. Une restauration est donc essentielle pour éviter des dommages irréversibles.
Le dessertissage est une étape délicate de la restauration des vitraux, consistant à retirer les éléments de verre de leurs baguettes de plomb sans endommager les pièces. Dans le cas des vitraux du choeur de l’église, une restauration antérieure mal exécutée a compliqué ce processus. L’utilisation d’un ciment à prise rapide, inadapté aux techniques traditionnelles, a durci de manière excessive,rendant l’extraction du verre plus difficile et augmentant les risques de bris.
Pour assurer une restauration fidèle, des tests de couleurs ont été réalisés afin de retrouver la teinte exacte de la grisaille d’origine. Différents mélanges de peinture vitrifiable ont été appliqués sur des échantillons de verre similaires, puis cuits au four à des températures précises. Ce processus a permis d’obtenir une correspondance, garantissant une intégration harmonieuse des motifs restaurés sans altération de l’équilibre visuel du vitrail.
La pièce maîtresse du haut du vitrail du centre à été refaite à l’identique. La pièce originale comportait plusieurs bris et une pièce impossible à reproduire. J’ai utilisé la grisaille et le jaune d’argent pour reproduire, après plusieurs tests, les teintes et l’intensité d’origine.
Pour la restauration des vitraux, la méthode de sertissage française fut privilégiée en raison de sa précision et de sa durabilité. Cette technique traditionnelle assure un ajustement parfait du verre dans les baguettes de plomb, renforçant ainsi la stabilité et la solidité du vitrail restauré.
Les baguettes ont été soudées au plomb/étain, assurant des jonctions solides et durables. Cette technique traditionnelle garantit une cohésion parfaite entre les intersections, renforçant la structure du vitrail tout en respectant son esthétique d’origine.
La cimentation du vitrail est essentielle pour assurer son étanchéité, renforcer sa structure et empêcher les vibrations, garantissant ainsi sa stabilité et sa durabilité face aux intempéries et aux variations climatiques.
Après la cimentation du vitrail, le bran de scie est utilisé pour absorber l’excédent de ciment et nettoyer la surface sans abîmer le verre ni la grisaille. Saupoudré sur l’ensemble du panneau, il est ensuite brossé délicatement en mouvements circulaires, permettant d’éliminer les résidus tout en lissant les joints pour une finition propre et homogène.
Les attaches vergettes sont installées pour fixer solidement le vitrail aux barres de renfort, empêchant ainsi tout affaissement et assurant la stabilité de la structure face aux contraintes mécaniques et aux vibrations.
UNE IMAGE VAUT 1000 MOTS !
AVANT/APRÈS : Nouvelle boiserie et vitre protectrice furent installées dans toutes les ouvertures de l’Église St-George
Détail du vitrail de la vitre maîtresse
Des pièces lacunaires apparaissent quand le casse-tête est assemblé. Enfin, dans sa version restaurée, le vitrail retrouve toute sa splendeur : chaque pièce de verre remplacée s’intègre parfaitement, restituant la continuité des couleurs et des motifs.
La vitre maîtresse, entièrement restaurée, a retrouvé sa place d’honneur, révélant toute sa splendeur d’origine. Les erreurs d’une précédente restauration ont été corrigées, avec un motif soigneusement rétabli et chaque pièce repositionnée correctement. Le vitrail, désormais harmonieux et fidèle à sa conception initiale, témoigne d’un travail minutieux dont je suis extrêmement fière.
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On en parle dans les médias
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VIDÉOS DE LA RESTAURATION
Découvrez en images la rétrospective complète de la restauration des vitraux de l’église St. George, un projet alliant savoir-faire traditionnel, techniques spécialisées et passion pour le patrimoine.
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EXPERTISES D’ICI par le CONSEIL DES MÉTIERS D’ART Dans cet épisode, faites connaissance avec Sylvie Savoie, artiste verrier. Elle nous transporte à Drummondville, dans le Centre-du-Québec, là où elles participent aux travaux de restauration des magnifiques vitraux de l’Église anglicane Saint-Georges, un bâtiment cité immeuble patrimonial.
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